Il y a maintenant 10 ans, je présentais un livre très touchant de Robert de Montesquiou, entièrement dédié à l'amour de sa vie, Gabriel Yturri (cliquez-ici) : Le Chancelier de Fleurs, publié à cent exemplaires en 1907. J'avais été personnellement touché par ce bel hommage rendu par un homme à un autre homme, qui était l'occasion pour nous de découvrir une autre facette de ce dandy fin-de-siècle. Modèle de l'homosexuel flamboyant, qui aurait inspiré le baron de Charlus, Robert de Montesquiou a su nous montrer, dans cet ouvrage, la profondeur et la robustesse de ses sentiments pour cet amour de vingt ans. Si Robert de Montesquiou a été le modèle du baron de Charlus, Proust a gommé cet aspect pourtant attachant de sa personnalité, peut-être parce qu'il avait du mal à imaginer un homosexuel simplement amoureux.
Gabriel Yturri (1860-1905) Source : Sotheby's |
Ces quelques réflexions me sont inspirées par l'actualité des ventes aux enchères. Il y a quelques jours, une maison de vente a proposé un ouvrage de Robert de Montesquiou que celui-ci a agrémenté d'un envoi à son "cher rencontré", belle preuve d'amour dans sa simplicité :
Source : Sotheby's |
Toujours dans cette vente, et plus émouvant je trouve, une autre belle preuve d'amour. Robert de Montesquiou a composé pour Gabriel Yturri un petit ouvrage contenant un poème calligraphié et une photo originale de Montesquiou. Il l'a fait relié et le lui a offert avec ces mots tout simples : "à mon fidèle Gabriel, aussi apprécié en 1903 qu’en 1885, cette prière, composée pour lui."
Source : Sotheby's |
Source : Sotheby's |
Dans la même vente, il était proposé un des cent exemplaires du Chancelier de Fleurs, avec un envoi un peu sibyllin à Pierre Loti, qui faisait donc partie de la centaine de destinataires privilégiés de cet ouvrage, "ceux qui, à travers les malentendus de la vie, et en dépit des méconnaissances du monde, ont su démêler dans l’Être exceptionnel qu'ils virent longtemps auprès de moi, quelques-uns de ces traits qui suffisent, par leur noblesse, à renseigner sur ce qui ne se livre point, d'un sentiment ou d'une pensée."
Source : Sotheby's |
A Pierre Loti
un miroir qui le reflète
dont la glace est faite des flammes
et dont l'eau contient des pleurs
Robert de Montesquiou27 juin 08
Source : Sotheby's |
Le 27 juin 1908, date de la dédicace à Pierre Loti, correspond à une lecture de cet ouvrage organisée par Robert de Montesquiou, lecture à laquelle Proust regrettait de ne pas avoir été convié. On comprend que Pierre Loti avait été invité.
4 commentaires:
Bel et émouvant article. Encore une magnifique contribution de votre érudition à la connaissance d'une époque dont on n'a pas fini de regretter les séductions cachées.
Merci pour votre sympathique message.
Merci pour votre blog, que je suis assidument.
Merci. Je connais aussi votre blog.
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